Bien que l’anxiété de performance ne soit pas un phénomène nouveau, elle est toutefois exacerbée par la vision actuelle d’une réussite sans échec (Ramirez, 2018). Souvent associée aux situations d’évaluation, elle peut impliquer des comportements d’évitement ou de compulsion, comme la consommation de psychostimulants afin de pouvoir étudier de longues heures (Service de psychologie et d’orientation de l’Université de Sherbrooke, 2011).
L’étudiant qui vit de l’anxiété de performance a tendance à surestimer le « danger » associé à une situation d’évaluation (par exemple, un examen) et à sous-estimer sa capacité à agir face à ce danger (Lupien, citée par Barriault, 2016).
Les caractéristiques d’une situation stressante (CINÉ) sont : C : faible contrôle de la situation, I : imprévisibilité de la situation, N : nouveauté de la situation, É : égo de la personne menacée
Centre d’études sur le stress humain, 2018
Plus la situation – ou plutôt l’interprétation que la personne fait de cette situation – présente les caractéristiques (CINÉ), plus elle sera perçue comme stressante par l’étudiant. Le fait d’anticiper une situation d’évaluation peut donc être pire que de vivre ladite situation : la sécrétion des hormones de stress est constante et il devient difficile de juger si la situation vécue est réellement menaçante (ibid.). Autrement dit, le message de danger devient faussé, comme si le système d’alarme était devenu trop sensible (Langlois, 2017).
L’anxiété de performance se manifeste par des symptômes variés qu’il est possible de classer en quatre dimensions (ibid.) :
Les récents résultats montrent que 35 % des étudiants collégiaux interrogés ont éprouvé « souvent » ou « tout le temps » de l’anxiété. Parmi ceux-ci, 33 % ont dit ressentir « beaucoup » ou « énormément » de pression liée à la performance scolaire.
Gosselin et Ducharme, 2017
Certaines causes psychologiques de l’anxiété de performance ont été identifiées (Service de psychologie et d’orientation de l’Université de Sherbrooke, 2011), notamment :
Voici des exemples de croyances irrationnelles :
L’anxiété de performance peut se manifester tôt, dès l’enfance. Les attentes irréalistes de certains parents peuvent engendrer une anxiété de performance chez leur enfant, même en transition vers le monde adulte : au lieu de percevoir les situations d’évaluation comme étant une manière de s’améliorer ou une occasion d’apprendre, l’étudiant pensera en mode dichotomique, soit d’échec ou de réussite (Robidoux, 2016).
Selon Pascale Brillon, psychologue spécialiste du traitement de l’anxiété, plusieurs facteurs sociaux peuvent expliquer la montée de l’anxiété de performance. Elle cite l’effet des réseaux sociaux sur le plan de la reconnaissance et de la nécessité du regard d’autrui. Les nouvelles technologies impliquent une disponibilité permanente, mais aussi une comparaison à « des idéaux extrêmes » (Brillon, 2015). En favorisant la présence constante de l’opinion d’autrui sur les réalisations individuelles (un marathon, une diplomation, etc.), certaines personnes peuvent avoir l’impression que les attentes externes sont élevées et que pour obtenir une approbation sociale, elles doivent en faire toujours plus (ibid.). Les causes ne seraient donc pas qu’individuelles : les valeurs véhiculées dans notre société de performance et d’ « hyperproductivité », qui peuvent exercer une forte pression sur les individus (Collin, 2015), peuvent être questionnées.
Cette présence de facteurs sociaux dans le développement de l’anxiété de performance montre l’importance pour les établissements d’enseignement supérieur d’élaborer des pistes d’action autant individuelles qu’institutionnelles et structurelles (voir Enjeu. Les interventions en amont pour améliorer la santé mentale des étudiants collégiaux et universitaires)
D’abord, sur le plan individuel, il importe d’encourager l’étudiant à prendre au sérieux ses manifestations d’anxiété et de l’inviter à consulter les ressources d’aide, afin qu’il prenne conscience de ses mécanismes. En effet, l’étudiant peut manifester des symptômes, sans toutefois être conscient qu’il est anxieux. L’anxiété de performance est l’un des troubles les plus faciles à traiter par l’entremise de la thérapie (Lupien, citée par Barriault, 2016). Les exercices proposés visent notamment à habituer l’individu à penser autrement lorsqu’il se retrouve devant une situation perçue comme une menace.
Recourir à de l’aide psychologique pour réfléchir à son perfectionnisme, revoir ses idéaux de réussite et la valeur qu’on s’attribue comme personne peut être bénéfique.
Robidoux, 2016
Sur le plan institutionnel, des ateliers variés portant sur les stratégies d’études (gestion du stress, activités de pleine conscience, relaxation, yoga, etc.) peuvent être offerts et bonifiés, avec l’aide de conseillers en soutien à l’apprentissage (ibid.). Il importe aussi de favoriser une culture de la demande d’aide (Ramirez, 2018), particulièrement dans des domaines à hautes exigences, où les étudiants sont habitués à être performants.
Enfin, en plus d’actions individuelles, cliniques et de campus favorisant de manière globale la santé mentale de leurs étudiants, des questions sur les valeurs véhiculées dans la société peuvent être posées, afin de ne pas perdre de vue que le dépassement de soi vise surtout à se réaliser, à se développer et à se sentir bien – et non mal (Collin, 2015).
Pour citer ce dossier : CAPRES (2018). Santé mentale des étudiants collégiaux et universitaires. En ligne : capres.ca/dossiers/sante-mentale-etudiants-collegiaux-universitaires/